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The Expert's Corner


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Published on 18 Mar 2022

Interview exclusive avec Michel Tognini, Pilote d’Essai, Général de brigade aérienne de l’Armée de l’Air Française et Ancien Astronaute du CNES et de l'ESA


Général de brigade aérienne et ancien pilote de chasse de l’Armée de l’Air française, Michel Tognini est un astronaute français qui a effectué deux vols dans l’espace. Nommé ensuite Chef du Centre des Astronautes Européens, il a notamment participé au recrutement de Thomas Pesquet. Il nous raconte son incroyable parcours à travers une interview exclusive.

Quel est votre parcours ? Quels ont été les chemins qui vous ont amené vers l’aérospatiale ?
J’ai fait mes études en région parisienne et ai suivi une spécialisation de la Troisième à la Terminale qui préparait aux arts & métiers dans le but d’être ingénieur. J’ai ensuite fait deux ans de classes préparatoires en maths sup et maths spé à Grenoble dans une école que l’on appelle l’école des pupilles de l’air. Il s’agit d’une école à vocation militaire qui prépare à l’école de l’air. J’ai fait cette école-ci car je souhaitais être ingénieur et me rapprocher des métiers aéronautiques. C’est une école militaire que j’ai beaucoup aimée. J’ai commencé à piloter des avions, faire du parachutisme et beaucoup de sport donc cet environnement me convenait très bien. Par la suite, j’ai fait l’école de l’air qui m’a amené à être ingénieur puis pilote de chasse. J’ai commencé sur SMB2 puis sur Mirage F1. Comme j'étais le plus ancien sur Mirage F1, on m'a ensuite demandé de faire l’école de pilote d’essai en Angleterre que j’ai faite et je suis ensuite devenu pilote d’essai. Comme j’avais trois ans d’ancienneté et que j’étais chef pilote d’essai à l’époque, je me suis présenté au concours pour être astronaute au moment de la sélection des astronautes français avec comme objectif d’être pilote de la navette spatiale Hermes. J’ai été reçu.

Par la suite, quand j'ai été sélectionné en 1985, il y a eu l’accident de la navette américaine. Je ne pouvais plus faire le vol avec les américains et de ce fait, je suis allé faire un entraînement ainsi qu’un vol chez les russes. J’ai commencé l’entraînement en 1986 pour faire le vol en 1992.

Enfin, je suis parti à la NASA pour faire une deuxième mission sur la navette américaine en 1999. Suite à l'accident de la navette spatiale Columbia, je suis revenu en Europe pour être directeur du centre des astronautes européens à Cologne.

Qu’est-ce qui vous a le plus marqué lors de vos deux missions spatiales : « Antarès » en 1992 et « STS-93 » en 1999 ?
Ce qui m'a d’abord marqué, c'est la vitesse à laquelle part la fusée. Nous partons du sol altitude zéro, vitesse zéro, et nous arrivons dans l’espace à 28 000 km/h en moins de 9 minutes. Nous faisons 16 fois le tour de la terre en une journée, ce qui est extrêmement rapide. J’ai également été marqué par la vue de la terre que je n’oublierai jamais. En tournant autour de la terre 16 fois par jour, il m’a été donné de voir des zones que je n’aurais jamais eu l’occasion de voir de mes yeux par la suite. J’ai également été marqué par le travail de nos ingénieurs. Lors de la première mission en Soyouz, nous décollons et allons rester deux jours dans le vaisseau spatial avant de rejoindre la station spatiale Mir. Le rendez-vous se fait à 28 000 km/h. Nous devons rentrer dans le système de rendez-vous et nous accrocher à la station à 30 cm par seconde. J’ai été estomaqué par la réussite des ingénieurs qui manient ça de façon parfaite. Le contrôle est vraiment très bien réussi.

Quel est le plus gros défi auquel vous avez été confronté lors de ces missions ?
Le plus gros défi a eu lieu lors de la première mission lorsqu’il a fallu s’adapter à ce nouvel environnement car nous ne savons jamais comment nous allons nous comporter dans l’espace. Nous avons toujours le mal de l’espace, nous ne sommes pas très bien pendant une journée ou deux. Nous devons faire face à cette adaptation que nous ne connaissons pas. Nous passons de 1G à 0G en l’espace de 5 minutes. Il faut tout faire sans l’apesanteur. L’apesanteur est bien pratique car lorsque vous êtes dans un bureau par exemple, vous pouvez tout poser sur le bureau et cela va tenir miraculeusement par l’apesanteur de la gravité terrestre. Le jour où nous sommes dans l’espace et bien nous ne pouvons plus rien poser par terre puisque tout va s’envoler donc il faut penser à tout attacher, tout verrouiller et dès que nous faisons la moindre action comme par exemple visser un socle par terre, il faut tenir le socle et lorsque nous poussons, c’est à dire exécutons une action avec notre corps vers le bas, il y aura systématiquement une réaction vers le haut de l’autre côté. Il y a beaucoup à apprendre mais finalement au bout de quelques jours, tout se passe bien.
Lors de la deuxième mission, le plus gros défi a été de lancer un télescope que l’on appelle Chandra. Il s’agit d’un télescope à rayons X qui était extrêmement lourd. Le gros défi était de bien réussir la mission et de ne faire aucune erreur pour que ce télescope qui a coûté extrêmement cher à la NASA puisse être envoyé correctement dans l’espace.

Que se passe-t-il dans votre tête au moment du décollage ?
Au moment du décollage, nous partons confiants. Nous avons du monde qui nous accompagne : les ingénieurs, amis, collègues astronautes, etc. Mes parents étaient là, mes enfants étaient là... Nous sommes entourés par toutes ces personnes et cela engendre une espèce de joie de voir tout ce monde. Il y a également un cérémonial qui est fait, en Russie comme aux États-Unis d’ailleurs, qui se produit toujours avec le même scénario. Nous partons toujours à la même heure du bâtiment des astronautes. Nous devons ensuite prendre le bus qui nous amène à la plateforme de lancement puis il y a l’habillage des scaphandres, le discours avec les ministres et les grands responsables, etc. Toute la préparation n’est pas très rapide. Nous arrivons ensuite dans la fusée. C’est là que nous ressentons une réelle différence puisque nous quittons ce monde trépident pour nous retrouver face à nous-même. Les trois astronautes montent dans la fusée donc nous ne sommes plus que trois et nous nous retrouvons vraiment tous seuls avec comme seul lien avec le sol, la radio. Nous allons faire appel à notre mémoire pour visualiser ce que nous faisions lorsque nous étions dans le simulateur. Nous avons répété au simulateur pendant deux ans avant la mission. Nous sommes comme dans le simulateur sauf que cette fois, c’est la vraie mission donc nous faisons les vérifications comme nous avons l’habitude de les faire avec notre checklist habituelle. Nous rentrons dans le vaisseau 2h30 avant le décollage et le compte à rebours arrive ensuite. Dans la dernière minute, nous avons fini l’action vitale ainsi que les vérifications. C’est là que nous sommes un peu plus inquiets car nous nous attendons à quelque chose. Nous savons que ça va se passer et que le demi-tour n’est plus possible à ce moment-là. Nous sommes obligés de partir. Nous savons que c’est dangereux aussi. C’est un mélange d’excitation, de joie et d’inquiétude… Il y a beaucoup de choses qui se passent dans la tête à ce moment-là. Il s’agit vraiment d’un mix de choses car c’est une découverte complète. Lorsque les moteurs s’allument, il y a un autre sentiment qui apparaît. Nous sommes vraiment à l’écoute de tout ce qu’il se passe. La fusée décolle et nous commençons à sentir l’accélération. Cette accélération est rassurante puisque c’est celle que l’on va ressentir lorsque l’on se trouve dans les centrifugeuses. À la différence que là, il y a à la fois l’accélération puis les vibrations donc ce n’est plus simulé comme dans le simulateur. L’ensemble de l’entraînement suivi en Russie nous confronte quand même un maximum au réalisme du vol.

Vous êtes donc bien préparé en amont pour faire face à toutes ces émotions qui se mélangent au moment du décollage…
Oui. Nous sommes bien préparés, après il y a bien sûr des parts d’inconnu que nous ne connaissons pas telles que la durée de l’accélération et les vibrations. Nous sommes quand même secoués au moment du décollage car nous passons en 4G en 9 minutes. C’est tout de même assez important mais dans l’ensemble, ça se passe très bien.

Comment avez-vous géré le stress lié à ces missions ?
Le stress est tout d’abord préparé par des séances que nous faisons au simulateur. L’entraînement est assez long, il dure deux ans pour une mission. Pendant ces deux années, nous allons apprendre tous les systèmes par cœur et à la fin, nous les connaissons vraiment bien. Nous faisons déjà fonctionner en nominal de façon individuelle puis en nominal de façon superposée. Nous nous penchons ensuite sur les pannes individuelles de chaque système puis sur les pannes complètes et les pannes superposées : panne électrique + panne de moteur + panne radio. Au fur et à mesure des missions dans le simulateur, nous arrivons à superposer pratiquement toutes les pannes. Les missions durent entre 6h et 8h au simulateur et se terminent toujours par un décollage suivi d’une panne radio, panne électrique, panne moteur et dépressurisation ou feu à bord. Enfin, nous concluons le tout avec le scaphandre pressurisé intégralement donc nous nous retrouvons complètement gonflés dans le scaphandre. C’est assez éprouvant d’être confronté à des pannes graves à chaque mission au simulateur, des pannes que nous ne connaissons pas bien sûr et qui sont envoyées par les instructeurs au dernier moment. À force d’être préparé et d’être mis face à ces pannes à chaque mission toutes les semaines ou deux fois par semaine, nous sommes vraiment rassurés lorsque nous arrivons en vol puisque nous avons répété ces actions vitales de façon très fréquente pendant tout notre entraînement.

Vous arrivez donc un petit peu serein sachant que vous avez été bien préparé…
Oui, si nous partions sans entraînement ou avec un entraînement réduit, il y aurait la peur et l’inquiétude. Je me mets à la place des gens, notamment les touristes qui partent avec très peu d’entraînement, c’est plus inquiétant bien sûr donc je leur tire mon chapeau. Notre entraînement nous rassurait, la gestion du stress est faite par la répétition des pannes au simulateur.


Vous êtes-vous senti changé au retour de ces missions ?
Oui, nous sommes changés au retour des missions parce que nous ressentons une sorte de plénitude. Il y a plusieurs sentiments qui se mélangent, tout d’abord la plénitude parce que nous avons réalisé la mission. Le monde des astronautes est un monde binaire donc que nous allions dans l’espace une fois ou sept fois c’est la même chose, nous sommes passés au-dessus de l’atmosphère et il y a ce sentiment d’avoir vu la terre différemment, d’avoir réussi la mission, le décollage, la mission scientifique et le retour sur terre. C’est pour cela que c’est un sentiment de plénitude pour nous. Il y a également un sentiment de tristesse parce que le moment important est derrière nous et il faut gérer l’après. Comment allons-nous faire pour que l’après se passe bien ? Il faut donc rebondir. Pour moi, l’après était le fait que je reparte à la NASA mais au moment où je me suis posé, je ne le savais pas. Ce qui change aussi c’est le fait d’avoir vu la terre de l’autre côté, la fragilité de l’atmosphère. Nous avons vu le monde avec la frontière verticale soit la frontière entre la terre et l’atmosphère qui fait à peine 100 km. Cependant, il n’y a pas de frontière horizontale. Au retour des missions, tous les astronautes que nous sommes, et nous sommes 550 dans le monde, prônons la paix dans le monde et c’est pour cela que les évènements actuels en Ukraine nous font beaucoup de peine. Nous menons des actions pour essayer de freiner ce mouvement de guerre qui est contraire à notre sentiment lorsque nous sommes là-haut.

Vous vous sentez concerné par ce qu’il se passe et vous pouvez mener des actions dans ce sens…
Oui, nous avons commencé à écrire des lettres. Nous faisons ces lettres car nous n’avons pas de vocation politique donc il s’agit d’une vocation scientifique de notre part, astronautes européens envers les cosmonautes russes pour leur dire que nous sommes contre cette guerre et que nous pouvons toujours trouver une solution diplomatique. Au même titre, les astronautes américains font la même chose donc nous sommes tous porteurs d’un message de paix. Nous sommes actifs mais nous ne pouvons pas convaincre des personnes qui ne sont pas convaincues de ce que nous disons. Cependant, nous intervenons pour éviter que cela dégénère au niveau du conflit actuel.

Avez-vous un souvenir particulier/une anecdote que vous garderez toujours en mémoire ?
Toute la mission est grandiose: le décollage, la vie dans la station spatiale, le retour au sol… Tout cela est quand même extrêmement émouvant mais le premier souvenir qui m’a marqué, c’est au moment du décollage avant de rejoindre la station spatiale. Nous sommes restés pendant deux jours dans le vaisseau Soyouz qui est extrêmement petit. Nous sommes vraiment compressés dans ce petit vaisseau et nous ne dormons pas beaucoup. Vous imaginez, après avoir passé deux jours et demi sans dormir, nous sommes un peu fatigués… Lorsque nous arrivons au rendez-vous, il faut que l’on soit en forme car une manœuvre très complexe et dangereuse nous attend. Nous sommes trois dans le vaisseau et je suis au niveau du côté droit. Il y avait un petit hublot pour regarder dehors. À ce moment là, je vois la station spatiale qui est environ à 40/50 km. Nous nous trouvons en dessous et au moment où je la vois, elle passe juste au Terminator. Le Terminator est la différence entre la phase de nuit et la phase de jour. Comme nous tournons 16 fois par jour autour de la terre et qu’une orbite de la terre dure 1h30, nous avons la moitié de jour et la moitié de nuit. Lorsque nous sommes au Terminator, tous les éléments qui s’y trouvent sont dorés. Au départ, je ne vois pas la station mais quand nous passons de la phase nuit à la phase jour, je vois un pic doré qui apparaît dans le ciel au-dessus de moi et c’est la station spatiale qui est là. Nous avons l’impression de voir une grande libellule avec ses antennes fragiles dans tous les sens et comme nous n’apercevons pas le sol puisque nous sommes en dessous, nous avons l’impression qu’elle n’est pas en déplacement par rapport à la terre vu que nous sommes à la même vitesse. C’est comme si elle était suspendue par une ficelle, comme si elle tenait miraculeusement dans l’espace. C’est une image extrêmement belle. Un objet doré dans l’espace. C’est presque surréaliste.


Que préférez-vous dans votre métier ?
Ce que j’aime bien dans ce métier-là, c’est que dans les deux cas, chez les russes et chez les américains, on se dit ce sera impossible au début lorsque nous arrivons. La somme de travail à faire et le nombre de choses à apprendre sont vraiment trop importants. Nous avons l’impression que nous n’y arriverons pas. J’ai dû entre autre apprendre le russe et c’était quand même compliqué car je suis parti de zéro. Ce que j’aime particulièrement, c’est que nous apprenons jour après jour. Le corps humain et notre cerveau se mettent à apprendre par cœur comme à l’école et au fur et à mesure, et bien on retient et on y arrive même si la tâche a l’air complètement impossible. Lorsque j’étais chez les américains et que je suis rentré dans la navette spatiale, j’ai vu le cockpit et tous les instruments, tous les boutons qu’il y avait à l’intérieur, nous nous serions crus dans un Boeing 747. Cela semblait impossible de le connaître par cœur et au bout de deux, trois ans d’entraînement, nous les connaissons tous par cœur. Nous pourrions presque les toucher les yeux fermés tellement nous les avons utilisés. C’est pourquoi je me dis que même une tâche qui paraît impossible au départ, est possible grâce à l’entraînement et au travail.

Donc ce sont vraiment des challenges jour après jour qui s’accumulent et qui font la beauté de ce métier…
Oui, j’aime bien parler de « plomberie neuronique » dans le sens où plus le cerveau se met à travailler, plus il arrive à apprendre. C’est vraiment important de pouvoir toujours travailler, étudier quelle que soit la tâche et quel que soit l’âge d’ailleurs, pour que son cerveau fonctionne bien. Le cerveau est vraiment un engin qui fonctionne bien lorsqu’on le sollicite mais qui s’arrête de fonctionner lorsqu’on ne le sollicite plus.

Si on vous proposait de retourner dans l’espace aujourd’hui, accepteriez-vous ?
Oui bien sûr, nous sommes plus de 500 astronautes sur terre et si vous leur posez tous la même question, ils repartent tous ! La mission est complexe et lorsque nous sommes en vol, nous avons vraiment l’impression d’appartenir à l’espace… Nous sommes là-haut en équipage de trois ou sept personnes, et en-dessous se trouvent huit personnes qui nous aident et qui nous ont préparés. Nous sommes donc à la pointe de cette pyramide inversée qui permet de réaliser la mission. Il y a également la vue de la Terre qui est unique et puis chaque vol est différent, chaque vol a une mission particulière. Nous avons l’impression de remplir une tâche fondamentale pour la Terre et je pense, comme tous les astronautes, qu’une fois que nous avons volé, nous pouvons voler à nouveau.

Quels sont vos prochains projets ?
Mes projets depuis que j’ai quitté cette partie spatiale sont toujours liés à l’espace donc j’écris des livres, je fais des conférences, pour les managers et également pour les écoles. J’aime motiver les étudiants, surtout les étudiants ingénieurs ou les enfants qui sont en difficulté. J’essaye de travailler avec eux comme au planétarium de Vaulx-en-Velin. Je suis aussi lié au lancement de microsatellites, avec la société « Van Allen» et ça marche très bien parce qu’avec un petit satellite qui fait 10cm par 10cm donc qui n’est pas très cher, nous arrivons déjà à faire des missions très importantes de surveillance. Je travaille aussi pour lancer une fusée, une fusée qui est très petite bien sûr, qui va lancer 350 kg en orbite donc ce n’est pas du tout Ariane mais c’est quelque chose que nous essayons de faire de façon privée. J’aide également à la préparation d’une capsule européenne. Nous avons Ariane 5, nous allons bientôt avoir Ariane 6 et nous devions lancer une navette européenne il y a 30 ans lorsque j’ai été sélectionné mais cela n’a pas été fait. Aujourd’hui, nous essayons de repartir sur une démonstration que nous pouvons faire: une capsule européenne lancée par Ariane 6 donc je travaille sur ce genre de projets-là aussi.

Que pensez-vous du tourisme spatial ?
Je sais qu’il est critiqué par beaucoup de personnes mais le tourisme correspond à une autre approche de l’espace. Premièrement, nous ne pouvons pas garder des vols uniquement pour des professionnels. Nous suivons un peu la même philosophie que les vols sur avion de transport. Il y a un siècle, ils étaient réservés à des personnes qui étaient un peu téméraires, casse-cous, qui faisaient des essais en vol ou qui faisaient la guerre. Puis l’aviation a débouché sur l’aviation de tourisme et commerciale donc aujourd’hui les gens volent dans le monde entier pour aller d’un point à un autre, pour travailler ou pour visiter. Le tourisme spatial c’est un peu la même chose, l’espace est une nouvelle destination. Nous avons commencé avec des professionnels puis nous aurons des stations spatiales privées comme Axiom pour le tourisme ou pour des réalisations privées. Cela permet de mieux partager avec le reste du monde, de convaincre des personnes qui ne sont pas forcément des ingénieurs ou des pilotes, ou qui sont d’un autre secteur. Moi qui ai vu les sept ou huit touristes qui sont allés sur la station Soyouz, la station russe, il n’y a eu aucun échec donc nous pouvons leur faire confiance. Quand ils rentrent au sol, ils vont parler de façon un peu plus positive donc cela nous aide.

Vous avez un avis plutôt positif sur la question…
Oui, j’ai un avis positif sur les touristes. Ils sont d’ailleurs membres de l’association « ASE Association of Space Explorers »  donc nous les prenons avec nous pour continuer à travailler et ils restent toujours intéressés par les vols spatiaux. Ils nous aident d’une façon ou d’une autre, qu’ils soient ingénieurs, dans le cinéma ou dans n’importe quel domaine. Nous sommes encore à la frontière de ces balbutiements, nous avons fait 400 km, ce qui correspond vraiment à la frontière de la terre. Il y a des missions lunaires, des missions martiennes qui se préparent et peut-être des missions vers les étoiles.

Quelles sont vos autres passions ?
J’aime voler. Je vole sur Cessna. J’ai été patron d’un aéroclub à Paris pendant 6 ans. Je fais aussi du kitesurf depuis 20 ans, c’est une autre passion. J’ai également un bateau à voile donc je fais beaucoup de navigation dans les airs et sur la mer.

Quel est le meilleur livre que vous avez récemment lu et pourquoi ?
Je suis actuellement en train de lire le livre de Houellebecq, Anéantir. Cela me plaît car c’est un univers un peu futuriste sur ce que les gens pourraient faire au niveau digital. C’est une énigme avec des personnages qui existent aujourd’hui, des géopolitiques, et un peu sur une destruction du monde au niveau digital. Il nous permet de bien prendre en compte le fait que l’on doive se protéger et faire attention à tout ce qui est relatif à l’image ou bien à la diffusion d’événements qui ne sont pas forcément vrais. Nous le voyons un peu à la télévision lorsque c’est la guerre et que les journalistes présentent des images d’un autre conflit. Cela nous permet d’être vigilants sur l’information que l’on reçoit. J’aime beaucoup lire en général. J’ai lu également beaucoup de livres de l’auteur Yasmina Khadra parce que cela explique un petit peu la vie dans le nord de l’Afrique avec leurs souffrances et leurs sentiments. Sentiments assez forts sur ce monde que l’on connaît peu.

Si vous pouviez vous téléporter tout de suite n’importe où dans le monde, quel endroit choisiriez-vous ?
Je dirais dans l’espace, sur Mars. Cela fait partie des destinations où personne n’a été donc j’irais pour voir ce que l’on peut y faire. Est-ce que l’on peut y vivre, travailler, mettre des maisons… Il fait cependant un peu froid: -20° mais j’ai connu -40° en Russie donc -20°, je peux supporter.

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